Ribambelle se fait la belle

VDM (vie de... marin !)
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Inauguration d'une nouvelle rubrique ! Il fallait bien ça pour mon coude et sa mésaventure du 14 août !
Après une deuxième nuit en mer dans Gascogne fidèle à sa réputation de machine à laver en mode essorage et alors que la mer est redevenue belle, je m'assoupis sur le banc du cockpit. Sur le banc au vent (pour les néophytes, du côté du bateau d'où arrive le vent, donc du côté "haut" du bateau qui a pris 20° de gîte, c'est-à-dire qui s'est incliné de 20° par rapport à l'horizontale).
A ce stade de la lecture, tous les marins crient in petto "nooooon, pas de ce côté là" !!
Et ils ont parfaitement raison : une vague un peu plus forte, souvenir de la nuit, et me voici violemment éjectée du banc dans le fond du cockpit, 30 cm plus bas mais directement et de tout mon poids sur mon coude replié. Vive douleur, impossible de prendre appui sur mon bras gauche ou simplement de le tendre. Houston, nous avons un problème. Dans la mesure où, à ce stade, mon coude est sous un t-shirt + un pull + un pantalon de quart + une veste de quart + un gilet de sauvetage, on va attendre un peu pour regarder l'ampleur des dégâts. Je me cale donc tant bien que mal dans le cockpit (sous le vent, cette fois !), avale deux Doliprane et attend la terre à neuf heures de navigation devant nous... autant vous dire que je ne suis pas mécontente d'arriver au port.
Le port, prévenu par radio, a appelé les secours. Enfin, une ambulance, dans la louable intention de m'emmener aux urgences.
Sauf que, les ambulancières refusent de descendre sur le ponton sans la présence de la police.
On appelle donc la police qui arrive une bonne vingtaine de minutes plus tard.
A ce stade, le bateau - entouré de deux responsables du port, nos voisins de ponton, deux ambulancières en tenue fluo et un policier ventripotent - est déjà très largement au centre de l'attention.

Enfin montées à bord, les ambulancières réalisent qu'il va falloir immobiliser mon coude avant d'envisager de me transporter. Manoeuvre d'immobilisation qu'elles ne maîtrisent clairement pas comme le prouve leur vigoureuse tentative pour mettre mon bras en écharpe.
Nouveau conciliabule, il est décidé d'appeler un médecin et les pompiers. L'Homme, rassuré par l'aspect de mon coude qui présente tous les signes d'une luxation plutôt que d'une fracture propose d'appeler aussi la douane et la gendarmerie maritime, blague heureusement faite en français et donc incomprise de l'aéropage présent autour de nous.
25 minutes plus tard - temps judicieusement mis à profit par l'Homme pour faire faire demi tour au bateau afin de le placer "cul à quai", position beaucoup plus adéquate pour descendre par la passerelle plutôt qu'en escaladant le bastingage en se tenant aux haubans - arrivent quatre pompiers, un médecin et un infirmier anglophone. Nous sommes définitivement l'attraction de la fin d'après-midi. Gaspacho, notre petit dernier est au comble du bonheur d'accueillir tant de gens intéressants sur son bateau, tous arrivés, qui plus est, dans des véhicules remplissant tous les critères de contentement d'un petit garçon de 4 ans.
On passe nettement un cap sur le plan de la prise en charge. Un petit cocktail tramadol/primperan (ça se dit pareil en espagnol à la grande joie de mon traducteur improvisé) pour calmer la douleur et mon bras se retrouve immobilisé dans une sorte de ballon. Encadré par les quatre pompiers, je descends enfin sur le quai (par la passerelle qui a le bon goût de ne pas céder sous ce large surpoids inhabituel !).

A partir de là, plus grand chose à raconter : les urgences de l'hôpital universitaire local sont un modèle d'organisation. La prise en charge est rapide, efficace et d'une grande gentillesse, dans un sabir majoritairement espagnol et minoritairement anglais, agrémenté de signes, finalement efficace. Beauté de l'Union européenne, la simple présentation de la carte européenne de sécurité sociale suffit à toutes les démarches administratives. La luxation du coude est confirmée, réduite et me voici affublée pour 10 jours d'une encombrante gouttière destinée à reposer les tendons... 10 jours à me faire servir comme une princesse et à entendre les enfants proposer spontanément de rendre les services auxquels ils rechignent d'ordinaire, je devrais pouvoir m'y faire !